Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le fantôme de Roucy
15 août 2010

David Haine

" Soyez franc, Haine... Vous savez bien, vous le premier, que notre chance d'être heureux, ou tranquilles, tout au moins, estPoinconneur maigre, rudement maigre. Nous ne serons jamais neutres, nous. Nous n'avons pas d'œillères. Ni les oreilles et le nez bouchés. Nous voyons trop bien, toujours, ce qu'il serait prudent de ne pas voir, nous entendons, nous sentons tout. Et nous réfléchissons, par là-dessus... Les heureux, les béats, solides, imperméables, satisfaits de tout et d'eux-mêmes, vous les connaissez, Haine ? Les flics, les garçons de café, les épiciers, les poinçonneurs de billets, les contrôleurs de ci, les contrôleurs de ça, les militaires de profession... On peut continuer longtemps, la liste est longue... Ceux-là ne s'interrogent pas beaucoup. Leurs grands problèmes, c'est de venir à bout de leurs cors aux pieds, d'aller aux chiottes à heures fixes, de pouvoir s'envoyer une part de moka en famille, chaque dimanche, en écoutant le comique de service à Radio-Luxembourg. Et s'ils s'intéressent quand même à leur prochain, c'est professionnellement, parce qu'il y va du pourboire et de la feuille de paie. Ils n'ont pas un cerveau bien rempli, Tarzan et La veillée des Chaumières leur suffisent ; pour eux, Dostoïevski c'est peut-être un gardien de but ou un catcheur polonais, mais ils ne s'en portent que mieux. Ma fille, elle, probablement, comme sa mère, comme vous, Haine, comme moi et quelques autres anormaux de notre espèce, se demandera toute son existence pourquoi Muichkine ou Aliocha Karamazov ont persévéré dans leurs erreurs, et quelle est la foutue glande qui nous pousse à leur donner raison, malgré tout..."
Les Dingues
Discussion entre David Haine et Scalby

Publicité
Commentaires
Publicité